Ludovic Freygefond, premier secrétaire fédéral du Parti socialiste de Gironde est convoqué mercredi 23 juillet devant le tribunal correctionnel de Bordeaux. L'ancien maire du Taillan-Médoc (2001-2014), petite ville de la communauté urbaine de Bordeaux (CUB), doit répondre de prise illégale d’intérêt et de corruption passive suite à la réalisation d'un projet immobilier d'envergure sur sa commune. Déféré le 19 juin après 48 heures de garde à vue dans les locaux de la division des affaires économiques et financières de la direction interrégionale de la police judiciaire de Bordeaux, il avait indiqué le lendemain vouloir se mettre en retrait de son poste au PS girondin.
Une enquête préliminaire le visant avait été diligentée en décembre 2012 sur la base de révélations portées à la connaissance de la justice par François Buhr, alors conseiller municipal d'opposition. Ce dernier suggérait que Ludovic Freygefond avait abusé de son statut de maire pour acheter des terrains à un prix préférentiel, les faire viabiliser sans frais et les revendre ensuite, lors de la construction et de l’aménagement du lotissement « Les Fleurs du Maynieu ». Epluchant la chronologie de l'opération immobilière incriminée, les policiers de la Direction centrale de la police judiciaire (DIPJ) ont ainsi mis en évidence les avantages consentis par le promoteur en contrepartie du soutien du maire au projet.
Le 16 avril 2008, Ludovic Freygefond s'est ainsi invité dans la vente d'un terrain non viabilisé convoité par une SARL, Arcla, qui voulait y réaliserr un lotissement de 18 lots. Le projet s'est retrouvé amputé du terrain acquis par l'ancien maire, à un prix au m2 négocié par le promoteur. Les enquêteurs ont eu confirmation que Ludovic Freygefond avait ensuite divisé ce terrain en trois lots, qu'il en avait conservé un où il avait fait construire sa maison et qu'il en avait revendu deux, devenus constructibles, réalisant au passage une conséquente plus-value. Lors de perquisitions à la mairie du Taillan-Médoc, à la société Arcla ou au domicile de l'ancien maire, les policiers ont saisi des devis, factures, comptes qui tendent à prouver que les coûts de la division, de l'arpentage, du bornage, de la viabilisation et du raccordement des terrains du premier secrétaire fédéral du PS ont été supportés par le promoteur qui, dans le même temps, a pu mener à bien son projet de lotissement.
« IL N’Y A PAS DE CORRUPTION »
Le rôle de Ludovic Freygefond leur paraît également déterminant tout au long de ce projet foncier, qui a fait l’objet de plusieurs délibérations auxquelles il a pris part. Aussi bien au Conseil municipal du Taillan-Médoc qu’à la CUB pour délivrer un permis de construire à l'acquéreur de son terrain ou pour des travaux d’infrastructure valorisant les abords du lotissement où il demeure. « Il a pu y avoir des maladresses et des erreurs autour de cette opération immobilière », concède Me Jean Gonthier, l'avocat de Ludovic Freygefond. Mais il dit son client « formel, catégorique et combatif sur son honneur et sa moralité d’élu ». « Il n’a pas marchandé, sacrifié, négocié, bradé, mis dans la balance sa position de maire pour obtenir quoi que ce soit. Il n’y a pas eu de pacte entre le promoteur et lui », répète le conseil depuis la sortie de garde à vue de son client. « Il n’y a pas de corruption. »
La maison du Taillan-Médoc a été saisie en tant que produit de l’infraction de corruption. Lâché le 22 juin par les cinq autres élus de sa liste d’opposition qui ont créé leur propre groupe, Ludovic Freygefond était présent le 8 juillet dernier, lors du conseil municipal du Taillan-Médoc qui a ajouté à son ordre du jour et voté une délibération autorisant la municipalité à se porter partie civile dans le dossier. Sollicité, le promoteur ne souhaite pas s'exprimer avant son procès pour corruption active. Ce projet immobilier était très important pour sa jeune société. Ludovic Freygefond était le maire, celui qui pouvait lever les obstacles à la délivrance d'un permis de lotir, celui qui pouvait lui octroyer le sésame refusé précédemment pour la création de son lotissement. Prévue pour mercredi 23 juillet, l'audience devrait être renvoyée au mois d'octobre à la demande des avocats de la défense.